Mission Canada // Part. 12 Gaspesie – Mont Saint Jean

Gaspesie - Mont Saint Jean

8h30 : Réveil matinale afin d’être paré pour une balade en canoë. Petit déjeuner avalé goulument pour une journée qui promet d’être sportive, pagayage, randonnage et conduitage ! Alors pour notre premier repas du jour ne lésinons pas sur les calories.

9h15 : Je pénètre le cœur léger d’un pas énergique dans l’accueil du camping ! Heu… y a quelqu’un ? Allo ? Pourtant c’est bien écrit « horaires d’ouverture : 9h-18h ». Bon bah on va attendre… Et un, deux, trois, quatre personnes de plus. Nous sommes tous étonnés de ne voir personne. Certains sont venus spécialement pour rendre du matériel, pour prendre des infos sur les randos avec leurs enfants, d’autres encore pour régler des activités.

10h15 : Toujours personne ! La file d’attente s’est réduite à deux irréductibles gaulois ! Tous les québécois d’origines sont partis. A croire que le français habitué des grèves sait prendre son mal en patience ! C’est ça où alors que le français est assez con pour garder espoir même après une heure d’attente, ce n’est pas pour rien que notre emblème est un coq ! Bon on décide de quitter les lieux, tant pis pour la ballade en canoë on trouvera une prochaine occasion. On reprend la route qui a fait tant souffrir les essieux et les amortisseurs de notre pauvre camping car, dénudé de bitume, blindé de sable et de cailloux pendant 10 kilomètres, l’horreur on a l’impression que par moment le véhicule va partir en pièce tellement il tremble.

11h15 : Après une autre route sauvage de 9 kilomètres pour arriver au parking de notre première rando, nous enfilons les sacs à dos et les baskets et c’est parti pour notre vrai marche avec la petite. 4,5 kilomètres pour 2h prévu dans le guide. Allez on y croit.

Les premiers mètres sont faciles, Emy semble intriguée par les rencontres mystérieuses qui peuvent se produire sur ce chemin. Le dénivelé est assez faible et le paysage est très beau, cela rappellerai presque la Corse par certains moments.

Gaspesie - Mont Saint Jean

11h30 : La montée se fait plus ardue. Emy commence à montrer des signes d’agacement. Pour créer de l’engouement et du jeu Agnès se met à courir devant nous et faisons mine de la poursuivre en criant : « police arrêter cette femme », au détour du chemin un groupe du personne nous arrête en criant « chut ! ». Mais on n’est pas dans une bibliothèque, pourquoi chut ? Oh ! Un orignal et son petit sont entrain de brouter paisiblement sur le côté du chemin. Ils sont à 3, 4 mètres de nous, c’est superbe de pouvoir les voir dans leur élément naturel et encore mieux qu’un bord de route. Ça se trouve c’est le même groupe qu’hier ? Non, la plus grande ne présente pas les mêmes blessures sur l’arrière train que la précédente. Oui je suis un expert en blessure d’orignal ! J’ai tout de même fait 8 ans de première année de biologie alors j’en connais un rayon sur les souffrances animales. J’espère que ça va remotiver Emy pour le reste du chemin.

Gaspesie - Mont Saint Jean

12h : Nous abordons des points de vue magique, qui inspire à la zenitude ! Pour Emy c’est plus tôt la relou-itude ! Elle commence à en avoir plus que marre de la montée : « moi j’aime pas quand ça monte, je préfère quand ça descend ! ». Bon en plus de 8 ans de facs j’ai aussi plus de 15 ans d’animation à mon actif donc j’ai dans mon sac à malice quelques histoires qui peuvent capter l’attention d’un enfant de 5 ans afin que ce dernier gravisse les derniers mètres sans prêter attention à la difficulté de poser un pas devant l’autre. Me voici donc à remixer l’histoire du petit Poucet ! Faut dire que je ne me rappelle plus du tout de la fin de cette histoire donc fallait bien broder. J’arrive tout de même à placer une petite morale sur la rédemption des mauvais parents et sur le droit à l’erreur qui pourra apporter à Emy sa dose d’éducation ludique.

12h15 : ça y est 894 mètres gravis fingers in the nose ! Le point de vue encore une fois est splendide, 360° sur le parc nationale de Gaspésie, on peut voir le Mont Jacques Cartier plus de 1200 mètres. Si un jour on revient dans cette région avec Agnès on fera valoir nos qualités de grimpeurs acquises en Corse dont les dénivelés feraient pâlir de peur les orignaux canadiens.

Gaspesie - Mont Saint Jean

12h30 : La descente est bien entamé lorsque encore une fois on nous fait signe « chut ! ». Non mais c’est une manie dans ce pays de faire taire les gens à grande gueule ! Oh encore un orignal ! Je me demande si cette fois ce ne sont pas les mêmes que nous avons croisés il y une heure ! En fait ça doit être des orignaux intermitemps du spectacle, ils doivent être un petit groupe au Canada et doivent régulièrement se relayer afin d’assurer aux touristes un peu de spectacle. Les caribous eux doivent être des fonctionnaires, donc autant dire qu’on ne les voit jamais, comme disait Clémenceau : « les fonctionnaires ce sont comme les livres dans une bibliothèques, plus ils sont hauts placés moins ils servent ! ». Dans la descente assez pentue parfois, Emy me fait part de son ressentie : « moi j’aime pas quand ça monte, mais j’aime pas quand ça descend non plus, j’aime quand c’est comme ça un peu plat un peu descendu ! » ça promet !

Gaspesie - Mont Saint Jean

12h45 : 1h30 soit une demi heure d’avance sur le timing avancé par le guide, Emy rentre dans la cours des grands des randonneurs acharnés, on a pu qu’à lui offrir la carte vieux campeur. Pause casdales bien méritée. Direction ensuite la dernière rando vers le lac aux américains. Pour motiver Emy je lui annonce qu’elle a droit de regarder un dessin animé à condition stopper en chemin pour une dernière promenade, marché conclu.

Gaspesie - Mont Saint Jean

14h : Arrivée sur le départ de notre chemin de 2,6 kilomètres. Au bout de 20 mètres Emy chute (non cette fois c’est pas le chute on se tait y a la famille orignal en représentation, mais bien le mot chute, verbe inventé il y a 4 000 avant J.C. par le philosophe J.C. de la famille de ma belle-mère, ce dernier était en pleine conversation avec l’un de ses élèves lorsque soudain son pied vint buter contre l’angle d’une pyramide et il termina sa phrase par chuttttttttteee ! Il voulait en fait prononcer le mot ‘chuternisme’ qui est une forme de grammaire révolue, son élève cru que c’était une figure de style de prononcer le verbe de l’action qui vient de se produire), énervé de lui avoir déjà répété plusieurs fois de faire attention en courant sans regarder devant elle, je lui ordonne de ne pas pleurer car je l’avais déjà prévenu ! Vexée, elle boude sur tout le chemin, prétextant que le chemin monte trop alors qu’on lui avait annoncé un parcours tout droit : «  de toute façon je voulais pas y aller moi ! ».

Gaspesie - Mont Saint Jean

14h30 : Arrivée devant le lac,  encore une fois c’est un paysage magique, un immense lac caché entre ces montagnes, ça rappelle forcément les contes et les légendes avec ces personnages fantastiques qui vivent dans ce genre de lieux. Au plaisirs de pouvoir mettre ses pieds dans l’eau Emy troque son boudin contre une partie trempage de petons : « c’est trop bien ce lac ! ». Le cœur des femmes c’est comme une boîte de chocolat, on ne sait jamais sur quoi on va tomber !

Gaspesie - Mont Saint Jean

15h30 : Retour au camping car après un retour en chantant ! Rien de mieux qu’un bain de pieds pour adoucir les mœurs, je vais proposer ça au prochain congrès pour la paix visant à trouver une solution pour le conflit Israelo-palestinien ! Des cures de bains de pieds. Départ pour notre étape du soir, le camping du Mont Saint Jean. Direction route 14, puis route 2, pour 56 kilomètres.

17h : Alors il faut savoir un truc, au Canada tout ce qui s’appelle route dans un parc national c’est une route sauvage comme décrit plus haut, donc imaginé ça sur 56 bornes. Le camping car, la vaisselle, les affaires, les occupants et le moindre recoin de cette charriote roulante sont recouverts d’une fine couche de poussière blanche, on a l’impression d’avoir fait une bataille de farine ! C’est à ce demander comment Emy pouvait encore voir l’écran de l’ordinateur. Mission lavage de printemps !

17h30 : Le camping est vidé de toute poussière et nous remplis de plein de boutons de moustiques, en dix minutes on a tout le commando de choc qui nous est tombé dessus, on se serait cru à Fort Alamo. Je commence à comprendre pourquoi dans ce camping seulement 5 emplacements sur 200 sont occupés, primo déjà pour venir jusqu’ici faut avoir envie de flinguer sa voiture, deuzio dans ce coin reculé entre deux montagnes tu n’as aucun réseau, et Tercio une bande de vampires ailés occupent les lieux depuis trois siècles et sont très affamés. Du coup on oublie le feu de camp ça sera pour demain. Mission lavage du linge et douche. Pour le linge bien sûr y a bibi qui s’en occupe, en mode kway, lampe frontale et déo anti-moustique sur tout le corps et c’est parti pour une mission nocturne pour aller au bout du camping en passant par la forêt afin de récupérer le linge lavé et séché : le ciel est noir, couvert de nuage, les lueurs de la lune peine à traverser. J’opte pour un pas dynamique et assuré, en allumant ma lampe je ne fais qu’éclairer une zone très faible autour de moi, mettant en évidence une immense zone de pénombre, la peur me gagne. J’accélère le pas, j’imagine une horde de moustiques sanguinaires qui n’attendent qu’une seule chose, le signal ! Ce signal, celui de ma lampe qui ne tardera à s’éteindre lorsque les piles seront épuisées. Que dire des Grizzlis qui n’auront pas la même gratitude, ils attendant simplement que je fasse le mauvais pas, celui qui me fera trébucher et tomber sur ce sol mouillé ! Je revois ma vie défilée, ces moments joyeux et les mauvais aussi, c’est si triste de mourir un jeudi ! Je souhaiterai que sur ma tombe soit posée l’inscription suivante : il donna sa vie pour du linge propre ! J’arrive à l’accueil, bien sur elle est fermée, je ne pourrai pas alerter quelqu’un pour prévenir les services de police ! Je m’engouffre dans la buanderie, fermant la porte derrière moi, me donnant ainsi quelques secondes de répit. J’empoigne la porte du sèche linge, je plie les vêtements et les ranges prestement dans mon sac. Je n’ai alors plus qu’une étape à franchir, le remplissage de bouteille d’eau, oui car lorsqu’on est un homme digne de ce nom on ne renie pas la moindre petite tâche pour servir sa famille. D’un pas chaloupé je rejoins les toilettes qui sont à trois mètres de là, à peine le temps d’émettre un ouf de soulagement que je remarque la présence d’un campeur dans le bloc des douches, je fais mine alors de respirer fort ! Je ne veux pas l’apeurer sur les ennuis qui l’attendent à l’extérieur, j’en fais une affaire personnelle. Les bouteilles sont remplies, il me reste le chemin du retour. J’opte rapidement pour une marche très dynamique, elle sera mon salut. Je sors, me concentrant sur la zone éclairée et non sur le reste, je longe le terrain de tennis désaffecté, pénétrant dans la forêt, je me retrouve ensuite dans cette pleine de jeux pour enfants dont la rouille n’est plus que le seul occupant permanent. Je vois au loin apparaître la lumière du camping car qui me tend les bras, et je sens dans mon dos battre avec frénésie cette horde de vermine au dard pointu. Je ne relâche pas mon rythme et saisi avec hâte la poignée de la porte, me hissant avec une promptitude assurée dans le véhicule. Agnès m’accueille naturellement d’un : « ah bah t’as fait vite », et à mon tour de répondre avec mon assurance légendaire qui a tant de fois fait faillir la foule : « tu sais les missions sauvetage de linge ça commence à me connaître, je maitrise ! »

23h : Le dernier épisode de Game of Thrones sonne le glas sur cette série que l’on attend pendant un an et qui s’achève en 8 épisodes seulement ! La carotte ! Et dire qu’on en redemande toujours autant.

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